
Une nouvelle étude dévoile comment les groupes terroristes opérant dans la zone sahélienne d’Afrique s’approvisionnent en armes.
Depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye, qui a basculé dans l’instabilité politique et sécuritaire, a fait du Sahel une véritable poudrière.
Du Tchadien Idriss Déby Itno au Nigérien Mahamadou Issoufou, presque tous les dirigeants ou ex-dirigeants africains dont les États sont en proie à ce facteur aggravant du fléau djihadiste l’ont martelé ces dernières années.
Ce que l’on savait moins en revanche, c’est que les flux d’armes en provenance de Libye ont diminué, dès 2014, d’après l’étude publiée mardi 29 avril 2025 par l’organisation Conflict Armament Research (CAR), sur les mécanismes de constitution de l’arsenal guerrier dans cette partie de l’Afrique désormais gangrénée par des bandes armées.
Parmi les facteurs de la baisse de l’influence libyenne dans l’armement du djihadisme sahélien figure, selon l’ONG britannique, l’amélioration des efforts d’interdiction sur les routes de transit traditionnelles, notamment au Tchad et le long des frontières nigérienne et algérienne.
Un cycle d’auto-alimentation préoccupant
Cette réduction s’explique aussi par l’augmentation de la demande intérieure d’armes en Libye, où les conflits communautaires entre différentes factions politiques se sont intensifiés.
Il reste que les violences, en revanche, ne faiblissent pas. Bien au contraire. De quoi se poser des questions sur la provenance du reste du stock d’armes du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) ou encore de l‘État islamique au Sahel (EIS).
Après analyse de 726 armes saisies entre 2014 et 2023, les chercheurs sont parvenus à une conclusion alarmante : environ 20% de l’arsenal provient directement des stocks des armées nationales sahéliennes. Un pourcentage probablement sous-estimé, selon Léo Jarry, coauteur du rapport.
Derrière cette réalité se cache une logique prédatrice destinée à transformer chaque succès militaire en opportunité d’expansion. « Plus ils saisissent des armes, plus ils attaquent des avant-postes [des armées], plus leur capacité à continuer de le faire augmente de façon exponentielle« , révèle Matthew Steadman, également coauteur de l’étude.
La fin d’un mythe tenace ?
L’un des aspects les plus surprenants de la découverte des chercheurs concerne l’étendue des armes qui tombent sous la main des djihadistes. Cela comprend des munitions allant de 7,62 x 39 mm à 14,5 x 114 mm, des roquettes RPG, des obus de mortier de 120 mm, des obus d’artillerie de 122 mm, des véhicules blindés de transport de troupes et des fusils d’assaut chinois Type 56-2, entre autres.
Autant d’armements délestés de pays comme le Mali, la République centrafricaine et la Côte d’Ivoire pour n’en citer que ceux-là.
Alors que les sources d’approvisionnement des groupes djihadistes du Sahel font fréquemment l’objet de mythes et autres rumeurs jamais étayées – la France serait notamment accusée d’en être partie prenante –, le rapport du CAR vient éclaircir le sujet. À moins que la machine conspirationniste ne s’emballe de plus belle.
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