CPI : l’Afrique au secours de Karim Khan ?

Le procureur de la Cour de La Haye, mis sur la sellette par des accusations d’« inconduite sexuelle », peut-il à nouveau compter sur le soutien du continent africain qui l’avait plébiscité lors de son élection pour sauver sa position ?

L’Afrique, qui a longtemps accusé la Cour pénale internationale (CPI) de mener des procédures politisées contre ses dirigeants, pourrait paradoxalement représenter la voie du salut pour cette institution judiciaire internationale, actuellement confrontée à l’une de ses plus graves crises internes.

Karim Khan, son procureur, a en effet été contraint de se mettre temporairement en retrait de ses fonctions le 16 mai dernier. En cause : des soupçons d’« inconduite sexuelle » nés d’accusations formulées contre lui par une de ses anciennes assistantes.

Cette femme, mariée et mère d’un enfant, évoque dans des témoignages consultés par le Wall Street Journal plusieurs épisodes d’actes sexuels non consentis que le procureur aurait commis sur elle lors de missions à New York, en Colombie, au Congo, au Tchad et à Paris depuis 2023.

Des accusations « catégoriquement » démenties par Khan, dont l’avenir à la tête de la CPI dépend désormais des conclusions de l’enquête menée par le Bureau des services de contrôle interne de l’ONU (BSCI) sur cette affaire aux multiples ramifications.

Parfum de pressions et de règlements de compte

Derrière ce dossier plane un lourd soupçon de pressions politiques et de règlements de compte. Karim Khan se présente comme la victime de représailles liées aux procédures judiciaires lancées contre des responsables israéliens et russes, notamment Vladimir Poutine.

Ses détracteurs l’accusent en revanche d’avoir voulu détourner l’attention du scandale qui l’implique par le biais des interventions de son bureau dans les conflits russo-ukrainien et de Gaza.

Dans ce climat tendu, les États-parties, seuls habilités à maintenir le successeur de Fatou Bensouda à son poste jusqu’au terme de son mandat en 2030 par un vote à la majorité absolue, observent la situation sans se prononcer publiquement pour l’instant.

Une forte base de soutien africain

L’avocat britannique de 54 ans pourra-t-il bénéficier, le cas échéant, de l’appui de l’Afrique ? Il dispose en tout cas d’une solide base de soutien sur ce continent où 33 États forment le plus important contingent des signataires du Statut de Rome, texte fondateur de la Cour.

L’ancien avocat du Libérien Charles Taylor, du fils de l’ancien dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, Seif al-Islam, ou encore du président kenyan William Ruto, avait déjà su compter sur le continent pour son élection, après avoir pourtant été dans un premier temps écarté du processus de sélection.

Les prochaines semaines ou les prochains mois – selon la durée de l’enquête de l’ONU – s’annoncent déterminants pour l’avenir de ce spécialiste du droit pénal international, qui avait promis de réformer une CPI toujours en quête de légitimité, 23 ans après sa création. L’Afrique devrait dans tous les cas y jouer un rôle central.


Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*