Mali : le dialogue national inclusif est-il crédible ?

Au Mali, le président Ibrahim Boubacar Keita a lancé samedi dernier le dialogue national inclusif. Cette initiative, qui se tiendra jusqu’au 22 décembre, est censée trouver une solution à la crise sécuritaire et humanitaire que vit le pays depuis bientôt huit ans. Mais est-elle vraiment crédible ?

Le président Ibrahim Boubacar Keita (IBK) a ouvert le samedi 14 décembre, à la salle Bazoumana Sissoko-Palais de la culture de Bamako, le dialogue national inclusif (DNI). Cette initiative, qui se tiendra jusqu’au 22 décembre, vise à trouver les voies et moyens de sortir le Mali de la crise protéiforme à laquelle il est confronté depuis 2012. Ces 10 jours de débat constituent la phase ultime d’un dialogue lancé depuis plusieurs mois, à travers des concertations locales dans 605 communes, 10 régions, 57 cercles, et dans les six communes de Bamako. Plus de 30 résolutions sont sorties de ces rencontres décentralisées.

L’opposition boude le DNI

A l’ouverture des travaux, le chef de l’Etat malien a admis que le Mali est malade et que dans ce contexte, le dialogue se propose « d’ausculter le pays et de faire des diagnostics pour le guérir ». Mais ce dialogue qu’il appelle si chèrement « inclusif » est-il crédible ? Pour l’opposition la réponse est « Non ». C’est pourquoi, cette rencontre va se dérouler sans la participation de plusieurs acteurs politiques et syndicaux qui estiment que le dialogue est « faussé ». C’est le cas Soumaïla Cissé, arrivé second à la dernière élection présidentielle. Il estime que cette initiative est « de la pure communication politique » et relève d’« une mise en scène » d’IBK pour bien se faire voir, après un automne sanglant (plusieurs attaques meurtrières de terroristes).

A l’inverse, les groupes armés signataires de l’accord d’Alger prennent part aux travaux.

Comme le chef de la tribu Kel Antessar de Tombouctou, Abdoul Majid Ag Mohamed, qui a déclaré que « Le dialogue ne pourra (pas) résoudre tous les problèmes d’insécurité liés au terrorisme », ADP-Maliba pense qu’il faut aller au-delà du simple folklore politique. Il faut combattre la corruption à la racine et surtout apporter les vraies réponses à la souffrance de la population malienne. La crise étant d’abord économique et sociale. D’où le Plan Marshall que son président d’honneur, Aliou Diallo a proposé lors de la campagne électorale de 2018.

Mali-ADP, un parti républicain

Malgré les nombreux griefs qu’il porte contre le pouvoir et ce dialogue, Mali-ADP assiste aux travaux de la Commission paix, sécurité et cohésion sociale. À la question de savoir pourquoi l’ADP-Maliba est là alors que l’opposition a décidé de boycotter le dialogue, son représentant et secrétaire politique, Baba Boubacar Keïta a répondu que « L’opposition, c’est aussi une diversité ». Puis d’être plus explicite : « Nous sommes une opposition républicaine, c’est-à-dire une opposition constructive. Nous dénonçons ce qui n’est pas bon et nous apprécions ce qui est bon. Et comme nous sommes dans un Dialogue national inclusif, nous n’avons pas voulu être à la marge. Nous sommes venus dire ce que nous pensons de tous les défis auxquels notre pays fait face aujourd’hui», a-t-il expliqué.

Des propositions concrètes

Mali-ADP ne fait pas que critiquer. Il fait aussi des propositions pertinentes, qui n’ont pas manqué d’attirer l’attention des 3000 participants. Baba Boubacar Keïta s’est notamment fait remarquer quand il a évoqué le problème de sécurité au Mali. « Une armée est constituée d’hommes, du matériel, du renseignement. Quand nous voyons notre armée maintenant, elle manque de tout ça. Elle est très affaiblie, politisée, etc ». Il a aussi préconisé, au sortir de ce dialogue, qu’il soit mis fin à la transhumance politique au Mali et soit créé un organe unique d’organisation des élections pour éviter les conflits de compétence et surtout contrôler les sources de financement des candidats à l’élection présidentielle.

Enfin, quant à l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, que tout le monde veut voir diluer (sauf les rebelles), Baba Boubacar Keïta affirme : « et accord n’est pas parfait. Il n’est pas non plus mauvais. Par exemple dans cet accord, il est prévu le désarmement et la réinsertion des ex-combattants, mais ce que nous voyons sur le terrain, c’est un désarmement sélectif. Je pense que le désarmement doit être total. Après, on passera à la réinsertion de ces ex-combattants».


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